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Les plantes de l'extrême
Les plantes de l'extrême
(désert Namaqualand en fleur - Les émanants)
présentation de l'éditeur....
"Aussi incroyable que cela paraisse, le désert peut se couvrir de fleurs, le cratère d'un volcan d'Hawaii se peupler d'une étonnante plante aux feuilles argentées, des baobabs millénaires surplomber une piste sur l'île de Madagascar, les descendants d'une plante apparue 350 millions d'années avant notre ère se développer dans une forêt de Champagne, des fleurs d'orchidées sauvages ressembler à s'y méprendre à des abeilles... Cet ouvrage, illustré de superbes photographies réalisées dans le monde entier, présente les plantes les plus extraordinaires pour leur orge, leur résistance au l'eau ou à la sécheresse, leur intelligence, leurs capacités de mimétisme, leur mode de reproduction... Autant de témoins de l'incroyable " imagination " des végétaux, capables de performances aussi extrêmes que celles de l'homme "Afrique
Plantes de l'extrêmepar Charlotte Lazard(SYFIA) Chaud ? Moi, jamais ! Les plantes des déserts poussent sous des climats torrides grâce à des trésors d'ingéniosité.
Désert du Tibesti. Mois de mai. 60°. Pas un souffle d'air. Rien ne bouge dans ce paysage figé par des températures de feu. Rien, si ce n'est une fourmi à la démarche claudicante. Se brûler les pattes ? Elle marche à cloche-pied sur deux pattes seulement en alternant régulièrement pour ne pas poser le pied par terre trop longtemps. Les plantes, ancrées dans le sol, ne peuvent pas inventer les mêmes astuces pour déjouer les méfaits de la chaleur.Comment survivent-elles dans des déserts où il ne pleut pas plusieurs années de suite, où l'humidité est presque nulle et où règnent des températures de fournaise ? Clairsemés, les arbres poussent pourtant dans le désert et couvrent les pentes du Tassili N'Ajjer ou du Hoggar, s'étirent le long des oueds du Tibesti ou de l'Ennedi ; des tapis de fleurs et d'herbe verte, l'acheb, surgissent des sables dès qu'il pleut, preuves que vivre dans le désert, c'est possible. A quel prix ?
La guerre de l'eau
Recroquevillées sur le sol, en boules ou cylindres, les plantes du désert sacrifient leur silhouette à la bataille pour la vie. Pas de feuilles vert tendre largement déployées sous les rayons du soleil. Plutôt des piquants, des rameaux durs et coriaces au vert foncé, parfois des poils pour se protéger de l'évaporation et faire de l'air ou encore des gouttelettes de matière grasse odorante, huile solaire de protection 100 % naturelle.Les agronomes ont démontré que la physiologie même de la plante changeait sous les climats extrêmes. Des organes et des tissus spécialisés sont chargés de capter le peu d'eau disponible. "Comme la surface de la feuille est limitée et qu'il est nécessaire malgré tout que l'arbre réussisse la photosynthèse, alors il dispose d'une autre ressource.Les rameaux eux-mêmes sont chlorophylliens et assimilateurs et remplacent en quelque sorte les feuilles, sans présenter, comme celles-ci, des surfaces évaporantes " explique Hubert Gillet, Sous-Directeur du Muséum d'Histoire Naturelle à Paris, naturaliste amoureux du désert pour y avoir passé de longs mois.Et si malgré cette précaution, l'eau manque encore ? Les arbres déploient d'immenses racines pour aller la chercher aussi loin que possible.Le balanitès, par exemple, le champion du désert, seul survivant en cas de sécheresse sévère, a des racines parfois vingt fois plus longues que son tronc. Jeune plantule, avant même de sortir son tronc du sable, il envoie jusqu'à la nappe phréatique une racine pivot qui s'enfonce comme un marteau piqueur. Sa principale source de subsistance assurée, il déploie alors sur plusieurs mètres un écheveau de racines horizontales chargées d'aller collecter l'eau de pluie ou cueillir les gouttelettes de rosée.Qu'une graine d'acacia se prenne de fantaisie de vouloir germer à ses côtés, et c'est la guerre de l'eau. Le trop peu est ennemi du partage. L'arbre secrète un produit toxique qui se répand dans le sol et empoisonne le voisinage... jusqu'aux prochaines pluies qui donneront de l'eau à tout le monde et dilueront le poison.
Des plantes-armures
Une fois l'eau captée, il s'agit de ne pas la perdre tout de suite par évaporation. Pour cela, une solution, se capitonner de la racine à la feuille. Pas un millimètre de la plante n'est exposé nu aux rayons du soleil, aux vents desséchants et à la chaleur du sol.D'abord, les racines. Elles s'emmitouflent en secrètant une substance collante où s'agglomèrent des grains de sable qui forment un tube protecteur : "Leur rôle n'est pas encore clairement défini mais on imagine que ce fourreau maintient autour de la racine une fine pellicule d'air qui tamponne la température et atténue l'évaporation" explique Hubert Gillet.Merveille de l'adaptation, lorsque l'humidité revient, ces manchons se désagrègent automatiquement et les racines peuvent reprendre contact avec un sol à nouveau clément. Graines et feuilles adoptent le même système de défense.Le tégument, enveloppe des graines, se fait carapace qui permet aux petits acacias, par exemple, de patienter plusieurs années avant de germer. Quant aux feuilles, elles sont protégées de l'évaporation par la cutine, sorte de cire, qui leur donne un aspect brillant.
Graine au bois dormant
Assurer sa descendance fait aussi partie des stratégies de survie. Les pluies étant pour le moins irrégulières -il peut ne pas pleuvoir plusieurs années de suite-, les graines doivent savoir attendre... sans mourir. Certaines plantes préfèrent garder leurs graines dans une poche spéciale aussi longtemps que la nature sera hostile aux "petits".Aux premières bonnes pluies, elles consentiront à lâcher leur progéniture. Pour les autres, la nature a tout prévu. Elles ont des hormones de dormance, formule magique qui les plongent dans un coma profond deux ans, trois ans, ou plus en attendant qu'une bonne pluie les réveille à la vie. Comble de précautions, les graines issues d'un même arbre, la même année, n'ont pas la même durée de dormance.Qu'une pluie soit éphémère et ne permette pas aux graines germées de parvenir à maturité, le monde végétal garde ses troupes de réserve prudemment endormies.Au réveil, il faut faire vite. Les pluies ne durent jamais longtemps dans le désert.Les pâturages réalisent leur cycle de végétation en moins de quatre semaines alors qu'une végétation semblable en pays tempérés demande quatre à cinq mois. Mais si tout est prêt chez les plantes du désert pour réaliser un cycle végétatif extrêmement rapide, il lui faut cependant des pluies conséquentes. Depuis quelques années, beaucoup de plantes du Sahara ne fabriquent des graines qu'un an sur dix. L'adaptation a aussi ses limites.Un poète a dit : "La plus belle fleur pousse au bord du précipice." Pour Hubert Gillet, "chaque arbre, chaque plante est une sorte de miracle du désert". Oasis miniature, leur microclimat permet l'existence de nombreuses espèces de plantules, d'insectes et même d'oiseaux qui ne pourraient vivre sans ces refuges. Sous son ombre, la vie se concentre dans le sol, à la surface, dans ses branchages."Un jour où il faisait très chaud, en plein désert, j'ai vu dans un même terrier à l'ombre d'un balanitès, un lièvre, un serpent et un ornithorynque. A la faveur de la fraîcheur de ce seigneur du désert, s'était scellé un pacte d'amitié entre des ennemis jurés". Les miraculés font parfois aussi des miracles.(source : syfia)"La source de nos informations est indiquée pour chaque parution, mais au cas où l'auteur de vidéos, articles ou photos ne souhaiterait plus les voir figurer sur le site, qu'il nous en avertisse par mail, et nous les retirerons immédiatement"