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Anamorphoses spectaculaires
Anamorphoses spectaculaires
L'anamorphose est un jeu optique par lequel la perspective d'une image est distordue. L'image et sa signification n'apparaissent alors que sous un point de vue donné ou grâce à un « décodeur », tel un miroir.
Le fantôme de Louis XV
Dans un portrait allégorique, Charles-Amédée Van Loo dissimule le portrait de Louis XV dit le Bien-Aimé : il n'apparaît qu'avec une lentille polyédrique dont le fonctionnement « magique » est fondé sur les lois de la réfraction.
Les Ambassadeurs de Hans Holbein le Jeunecontient près de la base de la toile l'anamorphose d'un crâne, qui est en fait une vanité. On ne peut voir le crâne qu'en regardant le tableau avec une vue rasante. Le peintre a caché discrètement le Christ en haut à gauche du tableau derrière le rideau. Car même si à cette époque on veut représenter les choses de manière réaliste, les peintres n'oublient pas pour autant le monde du divin et de la religion.
Quand on regarde le tableau de biais on voit ce crâne
Une anamorphose est une déformation réversible d'une image à l'aide d'un système optique - tel un miroir courbe - ou un procédé mathématique.
L'anamorphose désigne également la déformation de l'image d'un film ou d'une émission de télévision à l'aide d'un système optique ou électronique afin de l'adapter à un écran informatique ou de télévision (Format large anamorphosé, 4/3 ou 16/9).
Le mot est composé du grec anamorphoein (ἀναμορφόω) « transformer » et du suffixe -ose. Certains artistes ont produit des œuvres par ce procédé et ainsi créé des images déformées qui se recomposent à un point de vue préétabli et privilégié. Historiquement, l'anamorphose est l'une des applications des travaux de Piero della Francesca sur la perspective.
En effet, c'est la rationalisation de la vision qui a conduit à systématiser les techniques de projection, dont les anamorphoses sont l'un des résultats. Cet « art de la perspective secrète » dont parle Dürer connaît des applications multiples, aussi bien dans le domaine de l'architecture et du trompe-l'œil que dans des utilisations utilitaires. Son premier théoricien fut Jean-Louis Vaulezard. La dernière Anamorphose murale en France (8 mètres de long) est dans la chapelle des Jésuites du lycée du Sacré-Cœur à Aix-en-Provence.
Anamorphose classique
L'anamorphose est une particularité étonnante de la perspective. « La perspective est généralement considérée, dans l’histoire de l’art, comme quelque chose de réaliste restituant la 3e dimension. C’est avant tout un artifice qui peut servir à toutes les fins. Nous en traitons ici le côté fantastique et aberrant : une perspective dépravée par une démonstration logique de ses lois. » Introduction du livre Anamorphoses, ou Thaumaturgis opticus de Jurgis Baltrusaitis, Flammarion. »
On connaît, de Léonard de Vinci, cette anamorphose d’un visage d’enfant et d’un œil (1485, Codex Atlanticus). À regarder depuis la droite du dessin, en regard frisant.
Parfois, ce n'est pas le centre de la représentation qui est déformé, mais ses extrémités afin de donner l'impression que la surface du tableau n'est pas strictement plane. L'exemple le plus connu de ce type d'anamorphose en quelque sorte "inversée" est l'Autoportrait au miroir convexe du Parmesan (1524).
Avec Le Parmesan, le peintre est un « joueur »
Étonnant, cet autoportrait du peintre ! Mais, s'agit-il vraiment d'un portrait ?
Le Parmesan a-t-il voulu s'amuser avec son image, la modifier, et, donc en disposer ? C'est ce pouvoir du peintre – faiseur de miracles visuels – qui me fascine.
L'illusion concerne non pas la peinture mais le miroir parce que le premier élément que j’ai perçu dans cette œuvre est la surface bombée du miroir convexe.
En oubliant que je suis face à une peinture, Le Parmesan [Francesco Mazzola, dit Il Parmigianino] a réussi à me piéger : ce que j'ai regardé d'abord, c'est une image reflétée.
J'ai cru donc, un instant, voir une image dans un véritable miroir. Et si cette illusion a fonctionné si bien, c'est parce mon appréhension visuelle de cet objet a été instantanée.
Parce que la surface du miroir fait écran, l'image reflétée est très simple. La main sert de lien entre la surface du miroir et l'arrière-plan où est située la tête. Les détails des vêtements et le fond sont réduits à une expression sommaire.
Ce qui m'envoûte dans ce tableau n'est pas son réalisme mais son « côté » bizarre : je suis étonné non par la maîtrise technique, mais, intellectuellement, par une double modification :
- celle qui consiste à réaliser un autoportrait où le peintre a choisi de déformer son portrait.
- celle qui consiste à transformer ma perception en me faisant croire être devant un miroir et non une peinture.
Cette double modification n'a pas produit une représentation disharmonieuse. Bien au contraire, la main est certes disproportionnée mais très sensuelle, tandis que le visage est plus celui d'un ange que celui d'un homme.
Ce portrait prend ainsi une orientation à la fois artificielle et merveilleuse. Il ne décrit pas une individualité, il n'expose pas un état, au sens social du terme. Le Parmesan a réussi un magnifique autoportrait allégorique (son sourire mystérieux en dit long sur les mystères de l'illusion) et arbitraire (comme tout jeu).
Le Parmesan aurait-il voulu dire que le monde est un labyrinthe dans lequel on peut éprouver le plaisir de se sentir perdu ?
(source : culture-et-debats)Il s'agit dans ces trois cas d’anamorphoses directes. Il existe aussi d’autres types d’anamorphoses, où l’on interpose un miroir conique ou cylindrique entre le regard et la peinture qui, déformée, s’y reconstitue. C'est notamment le cas des anamorphoses chinoises datant de l’époque Ming (1368 à 1644).
Les anamorphoses à miroir permettent grâce à l'interposition d'un miroir cylindrique ou conique de faire apparaître une image qui est la réflexion d'une image déformée conçue à cet effet. L'image déformée est peinte sur une surface plane autour d'un emplacement prévu du miroir ; ce n'est qu'en y installant le miroir que l'image apparaît non déformée sur la surface de celui-ci. Répandu au XVIIe siècle et XVIIIe siècle, ce procédé d'anamorphose a permis de diffuser caricatures, scènes érotiques et scatologiques, scènes de sorcellerie et grotesques qui se révélaient pour un public confidentiel lorsque le miroir était positionné sur la peinture.
Parmi les peintres qui ont utilisé l'anamorphose, on peut par ailleurs citer Félix Labisse ou Salvador Dali. De nos jours, cette technique classique a été remise au goût du jour par le marqueteur et sculpteur sur bois Franc - Comtois Pierre Beuchey.
Trompe-l'œil en façade.
Les principales utilisations modernes de l'anamorphose interviennent dans le domaine du trompe-l'œil. Elles consistent à peindre d'une façon déformée et calculée une image qui se reconstituera, vue d'un point de vue préétabli, et donnera à la peinture murale une impression de relief et donc de réalité spatiale.
Vue de la petite place Saint-Georges à Paris, un peu plus haut, le spectateur découvre une façade d'immeuble avec fenêtres en arcades et à fronton, volets. Mais toute cette architecture apparente (moulurations, corniches, ombres portées, vitrages et reflets) est fictive, uniquement picturale, sans réalité volumétrique; elle n'est que la résultante visuelle de l'opération que produit l'anamorphose. L'image « anamorphosée » du théâtre vous paraîtra évidente de ce point de vue privilégié, mais en vous déplaçant vous verrez alors l'image se déformer et s'étirer étrangement.
L'occasion de créer une anamorphose nécessite une étude attentive et appropriée des circonstances scénographiques et topographiques satisfaisantes et un choix judicieux de points de vue obligés et privilégiés.
Une autre variante de cette technique a été réalisée par l’artiste Cinzia Pasquali, qui avait dirigé la restauration de la Galerie des Glaces du château de Versailles, pour décorer le tunnel autoroutier du Duplex A861. Sa fresque évoque le Roi-Soleil, dont la tête d’Apollon aux cheveux flamboyants a été déformée à 400% pour permettre aux automobilistes de la section Vélizy – A13 du tunnel d’avoir une perception globale de l’œuvre à une vitesse maximale de 70 km/h.
Ci-dessus, la façade en trompe-l'œil du théâtre Saint-Georges, réalisée par Dominique Antony. Anamorphose ludique La technique peut également servir un objectif plus ludique, rappelant les utilisations classiques, et cacher dans une image des éléments à découvrir.
(source : wikipedia)