• Anticythère dévoilée

    Découvertes extraordinaires

    ANTICYTHERE DÉVOILÉE

    Le fameux mécanisme d'Anticythère a livré quelques-uns de ses secrets à une équipe travaillant avec acharnement depuis plusieurs années. Ce n'était pas une horloge mais un calculateur de position de la Lune, du Soleil et peut-être de planètes. Sa technologie, plus complexe que prévu, laisse songeur.

    Avec au moins trente engrenages, ce mécanisme en bronze construit par les Grecs et daté du premier siècle avant Jésus-Christ est l'objet technique le plus sophistiqué qui nous soit parvenu de l'Antiquité. Trouvé en 1900 par un pêcheur d'éponge dans une épave au large de l'île d'Anticythère, entre le Péloponnèse et la Crète, il a beaucoup souffert des deux millénaires passés sous les eaux et se trouve aujourd'hui fragmenté en trois blocs quasiment fossilisés.

    Une longue succession de scientifiques est attachée à cet instrument depuis que l'archéologue Valerios Stais a découvert les engrenages en 1902. Dans la liste des contributeurs figure JACQUES -YVES COUSTEAU qui, en retrouvant des pièces de monnaie dans l'épave, a permis de dater l'objet, au moins approximativement. Dans les années 1950, Derek de Solla Price, physicien britannique, parvient à dégager quelques éléments et met au jour de minuscules roues dentées mais aussi des aiguilles et des cadrans. L'instrument porte de nombreuses inscriptions, manifestement relatives à l'astronomie.

     

    Mike Edmunds, astrophysicien, et Tony Freeth, à la fois mathématicien et cinéaste, se sont beaucoup dépensés depuis six ans pour étudier cet objet énigmatique. Avec l'assistance de XTec, une société britannique, ils ont mis au point un tomographe à RAYONS X spécialement conçu (et pesant douze tonnes !) puis ont fait appel à HP, qui avait auparavant développé une méthode pour analyser les inscriptions cunéiformes gravées dans la pierre. 

    Calculateur astronomique 

    Les conclusions viennent d'être présentées lors d'un colloque à Athènes et publiées dans Nature. Le mécanisme a pu être en partie reconstitué. Mis en mouvement par une manivelle (ou peut-être un système hydraulique), il ne peut pas faire office d'horloge. En revanche, les mouvements de ses aiguilles reproduisent le mouvement du Soleil et de la Lune avec une précision surprenante. La partie la plus spectaculaire se compose de deux disques superposés mais légèrement décentrés, l'un entraînant l'autre.

    A cause du décalage des deux centres, un mouvement régulier du disque entraîneur produit un mouvement irrégulier de la roue entraînée. Cette variation de vitesse reproduit exactement les accélérations et les décélérations du mouvement apparent de la Lune selon qu'elle est plus proche ou plus éloignée de la Terre. Cet instrument permet ainsi de prédire le mouvement du Soleil et de la Lune et par exemple de prévoir les éclipses. Les auteurs soupçonnent, mais sans pouvoir le prouver, que ce mécanisme reproduit aussi le cycle de quelques planètes.

    Qui a bien pu concevoir cet instrument, que l'on peut qualifier de calculateur ? Aucun autre mécanisme de ce genre n'est connu dans l'Antiquité et il faudra attendre plus d'un millier d'années pour qu'apparaissent en Europe des horloges astronomiques aussi sophistiquées. L'astronome grec Hipparque ayant décrit les variations du mouvement de la Lune, lui ou ses disciples sont soupçonnés d'avoir joué un rôle dans la construction de cet engin, d'autant que le célèbre astronome vivait sur l'île de Rhodes, dont pourrait provenir le navire qui a sombré devant Anticythère. Source : futura-sciences)

     ANTICYTHERE DEVOILEE 

    L'analyse de l'extraordinaire système d'engrenages, aujourd'hui daté du deuxième siècle avant Jésus-Christ, continue et nous gratifie de magnifiques surprises. En tournant, ces rouages annonçaient les éclipses mais aussi les dates des Jeux Olympiques... Les inscriptions, enfin décryptées, seraient des noms de mois d'origine corinthienne, ce qui ramène l'origine de l'invention vers l'héritage scientifique d'Archimède.

    En 2006, l'équipe de chercheurs travaillant sur le mécanisme d'Anticythère, motivée et pugnace, publiait ses premiers résultats sur le fonctionnement de cet ensemble d'engrenages métalliques. Découvert au début du vingtième siècle par des pêcheurs au large de l'île grecque d'Anticythère, ce mécanisme était passablement corrodé par deux millénaires passés sous l'eau. De nombreuses études ont été consacrées à cet objet étrange, qui ont mis en évidence des inscriptions illisibles, des roues dentées puis des aiguilles et des cadrans. D'abord daté du premier siècle avant Jésus-Christ, ce mécanisme a été récemment vieilli d'un siècle, et aurait été réalisé entre -150 et -100.

    Depuis 2000, deux passionnés, Mike Edmunds (astrophysicien à l'université de Cardiff, Grande-Bretagne) et Tony Freeth (chercheur en mathématiques devenu producteur de documentaires), rejoints par d'autres scientifiques au sein d'un ambitieux programme de recherche, sont allés beaucoup plus loin. En réalisant spécialement un tomographe à rayons X de douze tonnes, ils ont pu analyser la structure du mécanisme en profondeur et réaliser sur ordinateur un modèle virtuel, capable de tourner. Deux mille ans après le naufrage qui a englouti l'original, sa copie numérique  peut donc fonctionner devant les yeux des chercheurs. Qui n'en finissent pas d'être ébahis.

    Un engrenage spécial pour corriger une erreur de huit heures en 19 ans 

    Dans leur publication précédente, Freeth et ses collègues démontraient que ce mécanisme indiquait les mouvements respectifs du Soleil et de la Lune dans le ciel de la Terre. Mais il restait encore des aiguilles et des roues manifestement destinées à d'autres fonctions. Peut-être la reproduction du mouvement des planètes, pensaient alors les chercheurs...  

    Mais la solution était ailleurs. Tout d'abord, les nouveaux travaux de l'équipe ont précisé le système de prédictions des éclipses. Le mécanisme d'Anticythère reproduit le cycle de Saros, de 223 lunaisons, soit un peu moins de 19 ans, qui détermine le retour d'éclipses aux mêmes périodes de l'année. La durée de ce cycle n'est cependant pas un nombre entier de jours. Il s'en faut de huit heures, si bien que la même éclipse, observée un cycle plus tard à la même heure, se trouve décalée dans le ciel d'environ 120° en longitude. Les astronomes grecs de cette époque le savaient... Selon les auteurs de l'étude, une petite roue dentée servait spécialement à effectuer cette correction.

    La nouvelle étude a révélé un autre secret : cet habile mécanisme n'avait pas qu'une fonction astronomique. C'était aussi un calendrier. L'un des grands engrenages donnait le cycle de Méton, ou cycle métonique, de 235 mois lunaires, soit, à deux heures près, 19 années solaires. Au terme de ce cycle, les lunaisons reviennent aux mêmes dates de l'année. Les chercheurs ont pu décrypter les inscriptions gravées et ont découvert qu'il s'agissait des noms des douze mois. En contradiction avec des études antérieures, il s'avère que leur origine est corinthienne. Ces noms étaient utilisés dans les territoires du nord et de l'ouest, à Corinthe bien sûr mais aussi en Sicile, en l'occurrence à Syracuse. Or, c'est à Syracuse que vivait le grand Archimède, un siècle plus tôt certes, mais dont l'héritage scientifique a été transmis aux générations suivantes. Jusque-là, les soupçons portaient plutôt sur Hipparque, l'astronome qui vivait à Rhodes, d'où provenait le navire transportant le mécanisme avant de sombrer devant Anticythère.

    Une autre surprise attendait les hommes face au modèle virtuel du mécanisme. L'une de ses roues ne matérialise pas, comme on le pensait, le cycle calliptique de 76 ans (quatre fois le cycle de Méton). Il suivait un cycle de quatre ans, calé sur les jeux Panhelléniques et en particulier Olympiques...

    L'outil n'était donc pas destiné qu'aux astronomes mais prédisait aussi les dates de ces événements sportifs très importants de la civilisation hellénique.

    Source : futura-sciences 

     

      
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