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Les disparitions de sous marins
L'étrange disparition de la Minerve
Le 27 janvier 1968, le sous-marin la Minerve, l'un des fleurons de la Marine Nationale s'est immergé pour sa dernière plongée.
Il n'est jamais remonté.
Son épave n'a jamais été retrouvée.
Les causes de sa disparition ne sont toujours pas élucidées. Il y avait 52 marins à bord.
Ce matin là, le mistral souffle à 50 / 60 nœuds. Un temps à ne pas mettre un voilier dehors. Mais pas de quoi gêner un bâtiment de guerre, a fortiori un sous-marin. Il fait encore nuit quand la Minerve double la presqu'île de Saint Mandrier.
Le houlographe du cap Cépet indique une mer de force 5 à 6. La Minerve se rend sur sa zone d'exercice, à 12 milles sud sud-est du cap Sicié, là où les fonds tombent à 2000 m. Il a rendez-vous avec un Bréguet Atlantic de l'aéronavale, parti de Nîmes-Garons à 6 h 54 pour un exercice de détection magnétique.
A 7 h 19, première liaison établie. Le Bréguet indique à la Minerve que l'exercice ne pouvant se dérouler dans de bonnes conditions, celui-ci est annulé et qu'il ne fera que deux passes pour vérifier son radar. Si, malgré une mer forte, le calme règne en plongée profonde (300 m pour les sous-marins de ce type) ce n'est bien évidemment pas le cas lorsqu'il faut rester non loin de la surface agitée, comme cet exercice l'exige.
Immergé jusqu'au-dessus de la tourelle, le fardage (prise au vent) est réduit mais le bâtiment reste sensible à la houle. Seuls dépassent ses antennes de télécommunications et son schnorchel, un tube télescopique par lequel entre l'air utile aux moteurs diesel. Avec des creux importants, cette position en "ludion" près de la surface mouille les antennes. Les communications sont très mauvaises. A 7 h 37, le Bréguet revient pour un premier passage.
Les deux interlocuteurs arrivent tant bien que mal à se comprendre. La même chose à 7 h 45. A 7 h 55, le dialogue est le suivant : Avion : je compte annuler à 8 h 00 la vérification radar. Sous-marin : Je comprends que vous annuliez cette vérification.
M'avez-vous entendu ? Avion : Je vous ai entendu. Dans les quelques minutes qui suivent, l'avion attend du sous-marin un signe de réception de son signal radar. Pas de réponse. Pas non plus de liaison de fin d'exercice ni de formule de courtoisie, habituelle avant de couper. Jusqu'à 8 h 09, le Bréguet, avant de regagner sa base, essaiera en vain d'entrer en communication. La Minerve avait d'autres exercices à faire, en plongée.
Son retour était prévu à Toulon vers 21 h. Mais à 11 h, le Commandant des sous-marins en Méditerranée signale l'annulation des exercices en raison de la météo, et lui donne liberté de manœuvre.
La Minerve ne rentrera jamais à Toulon. Immédiatement, tous les moyens disponibles sont mis en œuvre pour sauver les éventuels survivants. Au-delà de 500 à 600 m de fond, il n'y a aucun espoir. Le sous-marin implose. Mais, si le submersible s'est échoué près de Toulon Il faut faire vite, car il a au maximum 100 h d'oxygène.
Cinq jours au cours desquels toute la zone est passée au crible. Le 1er février, il faut admettre l'évidence. La Minerve et ses 52 marins sont perdus. Nombre d'hypothèses ont été avancées. Une collision en surface : le Bréguet avait signalé deux navires de commerce.
Mais, dans ce cas, un sous-marin a généralement le temps de lancer un "May-Day". Une avarie de barre : des défauts avaient été constatés sur d'autres sous-marins du même type et la barre de plongée de la Minerve n'avait pas encore eu son tour de révision. Une brusque entrée d'eau par le schnorkel dont le système de clapet automatique, dépourvu de grille, aurait été détérioré par l'entrée d'un objet flottant : dix secondes d'entrée d'eau par une telle cheminée suffisent à déstabiliser gravement la flottabilité d'un sous-marin "entre deux eaux".
Une épave aurait été repérée dans les années 80. Les tôles légères seraient réparties sur plusieurs nautiques et la coque serait disloquée par la vitesse de descente et l'impact avec le fond. Elle n'a toutefois pas été identifiée avec certitude. Pour cause de secret défense, il faudra attendre 2018, cinquante ans après le naufrage, pour connaître les causes de cette disparition.
Si la Marine a quelque chose dans ses archives. Possible.
Jacques Isnard, journaliste au Monde, écrivait le 26 août 2000 :
« La marine française a alors entouré ce double naufrage d'un silence opaque, qui dure encore. La raison d'Etat s'est imposée. Au motif - non avoué officiellement - que les sous-marins de la classe "Daphné" () ont connu des succès commerciaux inespérés à l'exportation. ».
A vérifier dans dix ans.
Hélène Petit et Christophe Naigeon (source : cabotages)
LE NAUFRAGE DE L'EURYDICE
Il y a tout juste 40 ans disparaissait corps et bien le sous-Marin Eurydice.
A la mémoire de ces hommes glorieux. Quatrième sous-marin de la série des Daphné, l'Eurydice est toutefois le premier de ce type réalisé par la DCAN Cherbourg. Baptisé le 19 juin 1960, il est mis sur cale en juillet 1958 et mis à flot le 19 juin 1962.
Il quitte Cherbourg en juin 1963 pour effectuer sa croisière d'endurance (Dakar, Santa Cruz). Le 14 août 1963, il rallie Toulon, son port base qui le restera pendant toute sa carrière. Le sous-marin Eurydice entre en service le 26 septembre 1964, affecté à la 1ère escadrille de sous-marins.
Le 8 février 1968, lors d'une cérémonie à la mémoire des disparus de la Minerve, le général de Gaulle embarque à Toulon à bord de l'Eurydice pour effectuer une plongée à proximité du lieu du naufrage.
Le 4 mars 1970, l'Eurydice se perd corps et biens suite à un accident au large de Saint Tropez, faisant 57 victimes. L'épave de l'Eurydice sera localisée précisément et explorée, en avril 1970, par 750 mètres de fond. Plusieurs hypothèses ont été évoquées pour expliquer le naufrage de l'Eurydice, collision avec un cargo (le cargo tunisien Tabarka sera examiné en détail au bassin à Marseille), voie d'eau accidentelle, avarie de barre ?
Aujourd'hui encore, on ne connait pas la cause exacte de cette tragédie.
En construction à Cherbourg (juillet 1960).Baptisé Eurydice le 17 avril 1956, ce sous-marin voit sa construction commencer en juillet 1958 à la Direction des Constructions et Armes Navales (DCAN) de Cherbourg. Quatrième sous-marin de la série des Daphné, l'Eurydice est toutefois le premier réalisé par la DCAN Cherbourg.
Il est mise à flot le 19 juin 1962.
En juin 1963, il effectue une plongée statique dans la darse transatlantique à Cherbourg. Après la plongée, le sous-marin fait un essai au large sous le commandement du lieutenant de vaisseau Lavolé.
Le 14 juin 1963 a lieu la clôture d'armement, c'est à dire la « réception du bâtiment », qui marque le transfert de propriété du chantier vers la Marine. La clôture de l'armement intervient immédiatement après l'examen des installations.
Le 30 juin 1963, le sous-marin quitte Cherbourg pour effectuer sa croisière d'endurance. Il prend la direction de Dakar où il passe le 14 juillet, et poursuit sa randonnée en Atlantique central, fait escale aux Canaries. Le 22 juillet 1963 a lieu le traditionnel passage de la ligne. L'Eurydice est ainsi le premier sous-marin de son type à franchir l'équateur.
De retour de sa croisière d'endurance, le bâtiment arrive à Toulon le 14 août 1963, et est affecté à la 1ère escadrille de sous-marins. L'hiver 1963 est très difficile et très froid, l'eau gèle dans les bassins.
Suit différentes croisières en Turquie (Léonidas) et en Grèce (Izmir, Délos, Le Pirée, Corfou, avec traversée du canal de Corinthe sur le Gustave Zédée), Naples, la Sardaigne un week-end de Pentecôte durant lequel l'équipage reçoit un tonneau de vin offert par l'Aga-Khan, Barcelone et ses ramblas, Castellone de la Plana ou le consul invite le bord à une corrida mémorable. Les navigations sont marquées par plusieurs incidents : une grosse frayeur suite à une avarie de barre de plongée, des problèmes de clapets de schnorchel, bref un tas de petites choses qui laissent à penser que les drames de la Minerve et de l'Eurydice étaient peut-être prévisibles.
En escale en Sardaigne Avril 1964 : La Diane et l'Eurydice arrivent le 17 avril à Castellon de la Playa, petite ville espagnole à 60 km au nord de Valence. Une activité peu banale sera organisée au cours de l'escale. En effet, les sous-mariniers seront invités dans une hacienda, où, après une brève formation, ils auront la possibilité de manier la cape de toréador devant de véritable taureaux. Si certains marins se révéleront champions de course à pied, d'autres déchaîneront les "Olé" par leur habileté.
Juillet 1964 : En escale à Corfou, la Minerve, l'Eurydice, la Flore, la Diane, Le Savoyard, L'Alsacien, et le Gustave Zédé reçoivent la visite du Roi Constantin de Grèce le 17 juillet. Sa vedette royale salue de 21 coups de canons les bâtiments mouillés sur rade, puis le roi monte à bord du Gustave Zédé, se faisant présenter les officiers des sept bâtiments. Sa majesté descend ensuite à bord de la Minerve, où il montra très intéressé par la conception du bâtiment.
26 septembre 1964 : Admission au service actif.
31 octobre 1964 : En visite à Toulon, le vice-amiral d'escadre Lainé, commandant les forces sous-marines, récemment promu, embarque à bord de l'Eurydice pour assister à une série d'exercices au large de Toulon.
1er décembre 1966 au 1er octobre 1967 : Grand carénage dans un des bassins Missiessy de Toulon.
Eurydice part pour une plongée avec à son bord Pierre Messmer et le Général de Gaulle (8 février 1968)Le 8 février 1968, lors d'une cérémonie à la mémoire des disparus de la Minerve, le général de Gaulle embarque à Toulon à bord de l'Eurydice pour effectuer une plongée à proximité du naufrage. L'Eurydice est le deuxième et dernier sous-marin à avoir transporté un chef d'Etat (le premier président qui avait été embarqué à bord d'un sous-marin fut Emile Loubet). Le général de Gaulle laissera à bord une photo dédicacée où il est inscrit " Au sous-marin Eurydice en témoignage ! Et à la mémoire du Minerve ".
Le 4 mars 1970, l'Eurydice disparaît suite à un accident au large du cap Camarat par 43°16N/6°E.
Dépêché sur les lieux, deux Atlantic, les escorteurs Surcouf, Duperré, Le Picard, Le Vendéen, Le Brestois, L'Alerte, six dragueurs, les bâtiments de soutien Arago, Jean Charcot, les sous-marins Daphné et Doris, quatre dragueurs italiens et tous les bâtiments de la direction du port de Toulon disponibles, vont entreprendre les premières recherches. La gabare Fourmi découvre une tache de gas-oil et divers débris. L'analyse du gas-oil permis d'établir qu'il s'agissait d'un carburant de sous-marin avec forte teneur en souffre. Il n'y a plus de doute, l'Eurydice et ses 57 hommes d'équipage sont perdus.
Les zones des naufrages de la Minerve (27 janvier 1968) et de L'Eurydice (4 mars 1970).On ne connait toujours pas la cause exacte du naufrage. Ce qui est certain c'est qu'un événement imprévu a entraîné le perte de contrôle du sous-marin. Ce dernier a alors été entraîné au fond. La coque des sous-marins type Daphné peut résister (théoriquement) jusqu'à des profondeurs de 575 mètres. L'Eurydice aura été entraîné bien plus profond...
Des recherches pour trouver l'épave sont entreprises par un bâtiment de l'US Navy, le Mizar, à partir d'avril 1970, puis par le bathyscaphe français Archimède. L'épave de l'Eurydice sera découverte et localisée précisément le 22 avril 1970 par 750 mètres de fond.
Plusieurs hypothèses ont été évoquées pour expliquer le naufrage de l'Eurydice : 1) Une collision avec un cargo. L'identité de tous les cargos qui naviguaient dans la zone d'exercice avait été relevée. On s'intéressa notamment au cargo tunisien Tabarka, qui sera examiné par DCN au bassin à Marseille. Des traces de rayures sur sa coque peuvent faire penser à un choc léger avec les appendices du sous-marin, mais rien n'est vraiment sûr. 2) Une voie d'eau accidentelle ; 3) Une avarie de barre, comme celles qu'ont connues la Galatée en 1962, ou la Diane en 1964 ?
(source : lagrangedumilitaria)