Êtres imaginaires ou réels?
Les Fées
Une fée est un être imaginaire, généralement décrit comme anthropomorphe et du genre féminin (très rarement masculin), d'une grande beauté, capable de conférer des dons aux nouveau-nés, de voler dans les airs, de lancer des sorts et d'influencer le futur.
L'idée que l'Homme se fait des fées varie en fonction des cultures et des pays : revenants, anges déchus, élémentaires ou même humains, minuscules ou de taille humaine, toutes sont étroitement liées aux forces de la nature et au concept de monde parallèle. Ainsi, la Befana, la dame blanche, la sirène, les dryades, la fée Morgane et une grande variété d'êtres et de créatures généralement féminines sont considérés comme des « fées ». Les Anglo-Saxons utilisent le terme de « fairies » pour désigner les fées, mais également toutes les petites créatures anthropomorphes telles que les lutins, les nains et les elfes.
Issues des croyances populaires et de mythologies anciennes, de la littérature inspirée du folklore et des contes celtiques ainsi que d'anciennes divinités païennes, les fées sont une création de l'Occident médiéval. Elles jouent des rôles très variés, si elles aident, soignent, guident des personnes ou leur fournissent des armes enchantées, d'autres fées sont plus connues pour leurs « tours », leur habitude de danser en cercle et d'enlever des personnes, en particulier les nouveau-nés humains qu'elles remplacent par un changeling, ou encore celle de déguiser leur apparence et ce qui les entoure. Les fées font partie intégrante des croyances populaires dans des régions comme l'Écosse, l'Irlande, l'Islande et la Scandinavie, où des précautions à tenir envers elles ont été popularisées par le folklore, et sont également connues des folklores allemand, français et wallon. Au XXIe siècle, elles font toujours l'objet de croyances et de tous temps, des personnes ont affirmé les voir, communiquer avec elles ou invoquer leur aide.
Dès le XIIe siècle, deux grandes figures féeriques se distinguent dans la littérature d'Europe de l'Ouest : la fée marraine et la fée amante. Bien connues de la littérature médiévale, les fées disparaissent des récits à l'arrivée de la Renaissance, pour réapparaître sous de nouvelles formes dans Le Songe d'une nuit d'été de William Shakespeare, et les contes de fées qui modifient leur taille, leur apparence et leur symbolique. Les petites fées anglo-saxonnes sont popularisées durant l'époque victorienne, notamment par la peinture féerique. Elles sont désormais des personnages incontournables de la littérature fantastique et fantasy et du cinéma, entre autres grâce à Walt Disney qui les a largement popularisées aux États-Unis, à l'intérêt né des romans de Tolkien, et à des films comme Dark Crystal. Elles ont été abondamment étudiées et mises en avant par des spécialistes comme Katharine Mary Briggs, les illustrateurs Cicely Mary Barker, Brian Froud et Alan Lee, et l'elficologue Pierre Dubois à qui l'on doit, en France, la redécouverte du folklore qui leur est lié.
De nombreuses épithètes sont utilisées pour désigner les fées, telles que « bonnes », « bonnes-dames » et « bonnes et franches pucelles » en français, « bon peuple », « peuple des Fées » (wee folk, good folk, people of peace, fair folk…) ou d'autres euphémismes en langue anglaise, laissant à supposer qu'il est dangereux ou irrespectueux de prononcer leur nom.
Les fées sont par ailleurs à l'origine de nombreux proverbes et expressions populaires liés à leurs qualités supposées, tels « avoir des doigts de fée » qui désigne les personnes habiles de leurs mains, ou « vivre un conte de fées » qui signifie « voir ses rêves devenir réalité ».
Le kelpie, fée Unseelie et métamorphe issue du folklore écossais, personnifiant les dangers de l'eau. The kelpie de Herbert James Draper, 1913.
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Une difficulté dans la description des fées réside dans le fait que ce nom désigne des créatures différentes en fonction des pays et surtout des racines linguistiques ayant données le mot « fée ».
Selon la conception française et germanique des fées, ces dernières sont des êtres féminins dotés de pouvoirs surnaturels influant sur la destinée humaine. Le Dictionnaire Bouillet les présente au XIXe siècle comme jouissant d'un pouvoir surhumain, mais soumises quelquefois à des lois étranges et humiliantes. Laurence Harf-Lancner propose une définition différente, celle d'une « femme surnaturelle,
habitante d'un Autre Monde qui délaisse son lointain royaume pour s'intéresser de près aux affaires des mortels et diriger leur destinée ».
Une des Flower Fairies anglo-saxonne, vue par Cicely Mary Barker.
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Esprits élémentaires et forces de la nature
Bon nombre de fées personnifient des forces de la nature, car elles peuvent avoir pour fonction de la protéger, ou de symboliser ses attraits comme ses dangers, de même, il est universellement reconnu que les fées ne sont jamais liées aux zones urbaines, mais plutôt à la nature, particulièrement aux forêts, collines et points d'eau. Gaston Bachelard, notamment, a attribué aux Éléments naturels une existence autre que physique, ayant trait à leur symbolisme, à leur côté poétique et aux créations imaginaires qu'ils suscitent. Certains cultes à la nature sont à l'origine de croyances féeriques un peu partout dans le monde.
Les sirènes font partie des fées aquatiques selon Pierre Dubois. The Land Baby de John Collier, 1899.
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Les fées des eaux sont universellement connues, et incluent les sirènes, les nixes, les ondines, la vouivre, les Marie Morganes, la Rusalka, Vila et même Mélusine, Morgane ou la Dame du lac à l'origine. Claude Lecouteux cite un grand nombre d'êtres anthropomorphes cachées sous les eaux à guetter le passage d'imprudents pour les dévorer, dans le folklore germanique. Il semblerait que les naïades, les néréides et les sirènes de la mythologie grecque soient aussi à l'origine de la « fée des eaux ». La folkloriste Françoise Morvan a étudié ces créatures féminines qui, depuis des siècles, hantent les traditions populaires et donnent naissance à des récits étranges, qui ont eux-mêmes servis de source au romantisme européen. La mer primordiale étant un élément féminisé, la perception symbolique des rivières, sources et lacs est alors la même, celle d'un élément féminin qui influence la représentation des fées aquatiques comme superbes femmes à la longue chevelure flottante. Les fées des eaux ont toutes été diabolisées par le christianisme médiéval.
Wistman's Wood, dans la forêt du Dartmoor, est un lieu que l'on dit fréquenté par les fées.
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Les fées des végétaux, de la minuscule pillywiggin anglaise protectrice des fleurs à la dame verte de Franche-Comté, sont très nombreuses. Le culte des arbres est attesté avant la christianisation, preuve que le règne végétal est personnifié et considéré (en quelque sorte) comme « fée » depuis l'Antiquité. Alfred Maury assure que le respect religieux avec lequel les anciens Celtes pénétraient dans les forêts est dû à leur considération comme demeure des divinités. Les dryades et hamadryades, à l'origine divinités mineures du culte des arbres et de la forêt dans la mythologie grecque, sont parfois vues comme des fées. La blanche biche des légendes médiévales, qui apparaît au milieu des forêts et pousse les hommes à la suivre, est encore une fois liée aux fées puisque dans ce type de légende, la poursuite d'un gibier blanc (biche, cerf, lièvre ou sanglier) en pleine forêt mène à leur royaume.
Cette association des fées aux forêts est due au fait qu'il suffit d'entrer dans une forêt pour ressentir l'impression de « s'enfoncer dans un monde sans limite », d'après Gaston Bachelard. Pierre Dubois interprète cette sensation comme une ouverture aux rencontres féeriques.
La croyance populaire associe les forêts de Huelgoat, de Fouesnant, de Brocéliande (la forêt de Paimpont), du Dartmoor et du Devon (Wistman's Wood), ainsi que les landes écossaises et Irlandaises (telles Glendalough) aux demeures des fées, assurant que ces créatures s'y trouvent encore.
Un changeling (ou changelin) est un être féerique substitué à un enfant, dont la légende est connue dans toute l'Europe de l'Ouest. Les raisons d'un tel échange sont multiples, il peut s'agir d'un tour joué par les fées, du paiement d'une dette contractée par les parents de l'enfant ou de la fascination des fées pour les bébés humains.
La fée est originellement spécifique à l'Europe de l'Ouest, mais l'utilisation du nom et la symbolique attachée font que le mot « fée » a pu être utilisé pour désigner des créatures issues de cultures différentes, remplissant les mêmes fonctions. En Malaisie, sous le nom de pari-pari (en Malais) ou peri (en Indonésien), on retrouve des créatures exquises, ailées, entre les anges et les esprits maléfiques, qui visitent parfois le royaume des mortels, viennent en aide aux personnes dotées d'un cœur pur et sont liées à la nature. Walter Scott dit, sans certitude, qu'elles étaient originellement des fées dans son ouvrage Démonologie et sorcellerie, paru en 1832. Les créatures liées à la mythologie Shinto et au folklore japonais, telle que le kappa, sont également très proches des fées et remplissent les mêmes fonctions, tout comme Matergabia et les Poludnitsa de la mythologie slave, ou encore les Suchi du Pakistan.
Dans la littérature médiévale française, les fées sont des femmes parfaites qui ne présentent aucun attribut physique différent des humains : celles du XIIe siècle apparaissent grandes, blondes, et d'une beauté sans égale. Elles sont distinguées davantage par leurs habitudes et occupations que par leur physique. Les ailes et la baguette magique sont des ajouts des auteurs de l'époque classique. Le Dictionnaire Bouillet, au XIXe siècle dit qu'on les représente tantôt sous la figure d'une femme jeune, belle, couverte d'habits magnifiques, tantôt comme une vieille ridée et couverte de haillons, parfois armées d'une baguette magique, instrument de leur puissance surnaturelle. Enfin, sans être immortelles, elles ont une existence de plusieurs milliers d'années. La plupart du temps, les fées semblent porter des vêtements correspondant à leur époque, toutefois, les lais des XIIe et XIIIe siècles les présentent dévêtues, en relation avec l'érotisme de la fée amante. En Angleterre, les vêtements des fées sont verts, tout comme ceux des dames vertes en Franche-Comté.
La présence d'ailes et d'une baguette magique chez les fées est apparue à l'époque classique, et en est devenue une caractéristique populaire. Scène du film de 1918 Queen of the Sea.
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Les fées peuvent être vues comme des esprits de l'air ou des êtres éthérés (Fairies Looking Through A GothicArch par John Anster Fitzgerald).
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Le révérend Robert Kirk de la paroisse d'Aberfoyle, à Stirling en Écosse, a écrit un ouvrage majeur consacré aux connaissances féeriques en 1691, La République mystérieuse des elfes, faunes, fées et autres semblables, dans lequel il les décrit en temps qu'élémentaires :
Anges ou démons
Entre le bien et le mal, l'archange et le démon, la légende découvre un être. Cet être, c'est la Fée. Entre l'Eden et les Enfers, la légende rêve d'un monde. Ce monde est peuplé par les Fées. Entre la lumière et les ténèbres, la légende crée un crépuscule. Ce crépuscule devient la Féerie. »
Pierre Dubois, La grande encyclopédie des Fées
Une autre croyance voit dans les fées une classe particulière d'anges déchus. Cette croyance peut expliquer la tradition selon laquelle les fées ont dû payer une dîme à l'enfer, parce qu'elles étaient considérées comme des anges déchus, mais pas tout à fait comme des démons. L'association des fées aux anges, moins courante qu'avec les revenants, a cependant acquis une certaine popularité, en particulier dans les cercles théosophiques tel que le rapporte l'anthropologue et théosophe Walter Evans-Wentz. Les sources décrivant la nature des fées ont parfois soutenu les deux thèses d'ange déchu (troisième point de vue) et de démon (quatrième point de vue) simultanément, ou bien ont noté que la question est controversée.
Les habitudes des fées sont connues depuis les premiers écrits du Moyen Âge, en passant par la matière de Bretagne, les contes de fées et le folklore plus récent. Ainsi, la rencontre fortuite avec une fée ne se révélerait pas toujours bénéfique. L'un de leurs passe-temps favoris est de jouer des tours inoffensifs, par exemple en emmêlant les cheveux des dormeurs (ce sont les fairy locks ou elf-locks), en volant de petits objets ou en conduisant un voyageur à s'égarer. Des comportements beaucoup plus dangereux leur sont attribués : l'enlèvement par des fées provoquerait une forme de mort subite, et le cadavre de la victime demeurerait dans les bois avec l'apparence de la personne enlevée. Les fées sont également réputées forcer de jeunes hommes et femmes à danser toute la nuit, jusqu'à ce qu'ils dépérissent par manque de repos. Ce tour était considéré alors comme l'une des causes de la tuberculose. Celles qui chevauchent des animaux domestiques (comme les vaches, les porcs ou les canards) pourraient provoquer chez eux l'apparition de mystérieuses maladies ou même de paralysies.
Les fées sont étroitement liées au concept de monde parallèle, tel qu'il est évoqué dans la mythologie celtique et à travers le mot irlandais sidh. Elles peuvent habiter de merveilleux palais, le plus souvent situés au fond des eaux ou sur une île, telle la mythique Avalon. Dans les récits à leur sujet, ces lieux merveilleux de l'Autre Monde peuvent être découverts par un homme lors d'un voyage ou d'une quête, mais les fées peuvent aussi enlever des humains pour les y conduire. Selon le folklore, personne n'est à l'abri d'un enlèvement féerique et celui-ci peut ne durer qu'un temps ou pour toujours, et se révéler plus ou moins dangereux pour le kidnappé. Une femme qui venait de donner naissance et ne s'était pas encore rendue à l'église était considérée comme particulièrement vulnérable. Les histoires divergent quant au sort des captifs : certains mènent une vie joyeuse, d'autres sont à l'inverse tourmentés, d'autres enfin désirent ardemment revoir leurs vieux amis. Au XIXe siècle, dans Lady Isabel and the Elf Knight, le chevalier-elfe est un avatar de Barbe-Bleue et Isabel doit le tuer afin de sauver sa vie. Tam Lin révèle que le personnage-titre, bien que vivant au milieu des fées et possédant leurs pouvoirs, est en fait un « chevalier terrestre » qui mène une vie agréable mais craint que les fées lui fassent payer la dîme de l'enfer. Sir Orfeo raconte comment la femme de ce dernier est enlevée par le roi de Faerie, et parvient à s'échapper par la ruse, grâce à son excellent jeu de harpe. Sir Degaré raconte l'histoire d'une femme qui vient à bout de son amant féerique, lequel est démasqué comme un mortel dans les versions ultérieures de l'histoire. Dans Thomas le Rimeur, Thomas s'échappe avec moins de difficulté mais passe sept ans au pays des elfes.
Dessin de John Bauer représentant deux trolls en compagnie d'un enfant humain qu'ils ont enlevé.
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Une croyance partagée dans bon nombre de folklores veut que consommer la nourriture des fées scelle l'impossibilité de quitter leur royaume, tout comme dans le mythe de Perséphone et Hadès. Cette consigne est souvent donnée aux captifs qui se libèrent du pouvoir des fées grâce à d'autres personnes venues les délivrer : s'ils ont consommé la nourriture des fées, ils ne peuvent pas être libérés. Dans le lai de Guingamor, ce dernier semble pouvoir quitter le royaume des fées bien qu'il y ait mangé, mais lorsqu'il mange une pomme après avoir franchi la rivière qui sépare les deux royaumes, les trois siècles qui se sont écoulés sur Terre le rattrapent.
L'un des aspects les plus dangereux du séjour en contrées féeriques réside dans le fait que le temps s'y écoule différemment. Dans la mythologie celtique, Oisín est mis à mal non par son séjour, mais par son retour : quand il descend de cheval, les trois siècles qui sont passés dans le monde réel le rattrapent, le faisant tomber en poussière. Le roi Herla (Herla cyning), originellement un aspect d'Odin christianisé sous les traits d'un roi, dans un conte de Walter Map, rend visite à un nain dans sa demeure souterraine et en revient trois siècles plus tard. Bien que certains de ses hommes soient tombés en poussière lorsqu'ils mirent pied à terre, Herla et les hommes qui restèrent en selle furent condamnés à ne jamais pouvoir descendre. Ce conte est l'une des origines de la chasse sauvage du folklore européen. On retrouve ce thème dans le lai de Guingamor, et de nombreuses autres légendes.
Une caractéristique commune à toutes les fées est l'utilisation de la magie afin de déguiser leur apparence et celle de ce qui les entoure. L'or des fées est universellement connu pour être peu fiable, apparaissant comme de l'or quand il est donné en paiement, puis se révélant comme des feuilles, des ajoncs, des fleurs, des épices, des gâteaux ou une grande variété d'objets inutiles. L'illusion est également implicite dans le conte Fairy Ointment et ses variantes fréquentes en Europe du Nord, qui racontent comment une femme humaine est convoquée pour assister à une naissance féerique, ou parfois à l'accouchement d'une femme mortelle capturée par les fées. Invariablement, elle se fait remettre une pommade pour les yeux de l'enfant et on lui demande de l'oindre.
Par hasard, ou quelquefois par curiosité, la femme utilise la pommade sur l'un de ses yeux, parfois les deux. À cet instant, elle prend conscience que tout autour d'elle n'était qu'illusion, qu'elle n'assiste pas une riche dame dans une maison cossue, mais sa propre servante qui s'était enfuie, dans une grotte misérable. Elle s'enfuit sans révéler sa nouvelle capacité, mais trahit tôt ou tard le fait qu'elle soit capable de voir les fées. Ces dernières se vengent en la rendant aveugle de l'œil clairvoyant, ou des deux si elle a utilisé la pommade sur les deux. L'onction serait pratiquée par les fées afin de guérir certaines maladies, notamment la folie.
La fée peut aussi être invoquée pour protéger certains lieux. Le meunier, considéré comme « peu futé » par les Écossais, avait toutefois la capacité de contrôler les forces de la nature, comme le feu dans le four et l'eau durant la cuisson, par le biais de plusieurs machines. Les communautés superstitieuses ont cru que le meunier était de connivence avec les fées, qui en Écosse sont souvent malicieuses et à craindre. Personne n'osait mettre le pied au moulin ou au four durant la nuit car il est bien connu que les fées apportent leur blé à moudre dès la nuit tombée. Tant que les gens du pays croyaient cela, le meunier pouvait dormir tranquille, sachant que personne n'oserait tenter de le voler. John Fraser, le meunier de Whitehill, près d'Hamilton, a affirmé s'être caché et avoir vu les fées essayer en vain de moudre. Il a décidé de sortir de sa cachette et de les aider, là-dessus, l'une des femmes-fée lui aurait donné un gowpen (une double poignée de grain) et lui dit de la mettre dans son girnal (magasin) vide, car les réserves resteraient alors pleines pendant une longue période, quoi qu’il en sorte.
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Origine des fées
Plusieurs théories, coexistent pour expliquer l'origine des fées. La plus largement reconnue par les folkloristes, historiens, ethnologues, archéologues et écrivains voit dans les fées la survivance des divinités et esprits mentionnés dans les croyances païennes, notamment greco-romaines et celtiques, dont la fonction s'est trouvée modifiée avec la venue du monothéisme et surtout du christianisme en Europe, diabolisant ou rationalisant ces êtres.
Ainsi, dès le VIe siècle, Martin de Braga dit que les esprits des arbres et des eaux sont des démons chassés du ciel. L'érudit Alfred Maury explique qu'à son époque, les auteurs faisaient descendre les fées des nymphes, des Parques et des druidesses. Walter Scott fait des sylvains, satyres et faunes, créatures sylvestres et champêtres des mythologies, les ancêtres des fées écossaises :
« Ces sylvains, ces satyres et ces faunes, dont la superstition peuplait les rives touffues et les bois élevés de cette contrée romantique, furent obligés de faire place à des déités dont le caractère ressemblait beaucoup au leur, et qui probablement tiennent quelques-uns de leurs attributs de leurs prédécesseurs classiques [...] nous voulons parler des fées. »
Walter Scott, Histoire de la démonologie et de la sorcellerie
Les différentes théories ne sont pas forcément exclusives, le mélange de certaines d'entre elles peut expliquer l'origine de divers personnages féeriques en Europe de l'Ouest. D'autres auteurs restent dans le domaine mythologique, tel l'Irlandais William Butler Yeats pour qui les Tuatha Dé Danann devinrent les fées lorsqu'ils furent vaincus, certains se faisant invisibles, d'autres gagnant Tir Na Nog et les derniers se cachant sous les tertres. Pierre Dubois remonte à la cosmogonie de la mythologie nordique, où le géant Ymir, démembré, donne naissance aux alfes (alfes sombres, alfes noirs et alfes lumineux), qui eux-mêmes engendrent tout le petit peuple.
Les écrivains ont parfois livré leurs propres visions, souvent poétiques, de l'origine des fées. C'est le cas de J. M. Barrie qui raconte dans un chapitre du roman The Little White Bird au sujet de Peter Pan, en 1902, que « lorsque le premier bébé rit pour la première fois, son rire éclata en un million de fragments qui se dispersèrent en tous sens. Ce fut le commencement des fées ».
Alfred Maury et Laurence Harf-Lancner voient dans les divinités liées au Destin, Parques, Nornes et Sybilles, les ancêtres des fées françaises, de même que les auteurs du Dictionnaire des symboles pour qui « cette filiation n'est guère discutable », Karl Grün dans Les Esprits élémentaires (1891) affirme que les fées allemandes sont également issues des trois Nornes et Claude Lecouteux cite la Fylgja, incarnation féminine du destin des héros, comme origine possible des fées scandinaves.
Undine (1872, huile sur toile) par John William Waterhouse. |
Durant l'époque victorienne, l'explication des mythologies voulait que toutes les divinités soient des personnifications de forces naturelles. Suivant cette théorie, les fées sont à la fois des personnifications de la nature et des allégories de concepts abstraits tels que l'amour et la victoire, déifiés dans le panthéon des différents animismes qui forment les plus anciennes religions en Europe de l'Ouest. Pierre Dubois reprend également cette théorie, ajoutant que le regard posé par l'homme sur la nature pour y percevoir des présences cachées est une manifestation de son subconscient.
Une dernière théorie, popularisée par Katharine Mary Briggs et Lady Wilde, mère d'Oscar Wilde, lie les fées au souvenir d'un type de culte des morts. Elle s'appuie sur la confusion, dans un certain nombre de croyances et de légendes, entre les fantômes et les fées, sur le Sidhe considéré comme un tertre funéraire, sur le fait qu'il est dangereux de manger de la nourriture en pays de féerie tout comme dans le royaume d'Hadès, et sur le séjour des morts et de bon nombre d'êtres du petit peuple sous terre.
Une croyance ancienne voyait dans les fées un souvenir des druidesses. Au XIXe, Collin de Plancy l'assurait, ajoutant que l'on chargeait de cultes à la nature, et à qui l'on a plus tard attaché des demeures au fond de puits, près des torrents, ou dans les cavernes. Jules Garinet pensait que les fées sont les femmes des druides et Olaus Magnus parle de divinités de la forêt résidant dans des antres obscurs, qui se montrent à ceux qui viennent les consulter, et disparaissent soudainement : ce seraient originellement des druidesses, devenues des fées.
Une idée répandue parmi les nations celtiques, parle d'un peuple de petite taille qui fut peu à peu chassé par d'autres hommes, et condamné à vivre dans la clandestinité. Ils en seraient venus à être considérés comme une autre race, voire des esprits, et sont réputés vivre sous terre, cachés dans les collines (notamment les tumuli), ou encore de l'autre côté de la mer à l'ouest. Certains archéologues du XIXe siècle pensèrent qu'ils avaient trouvé des chambres souterraines dans les îles Orcades ressemblant au pays des elfes dans Childe Rowland. Selon le folklore populaire, les pointes de flèches en silex de l'âge de pierre sont fabriquées par les fées qui s'en servent pour lancer l'elf-shot. La réaction des fées face au fer a été interprétée comme la peur de ce peuple supposé face à des envahisseurs portant des armes en fer, tandis que les fées étaient seulement armées de silex et facilement vaincues lors des batailles physiques. Les vêtements verts et les demeures souterraines attribués aux fées sont vus comme une réponse à leur besoin de se cacher des humains hostiles, et leur utilisation de la magie comme étant le développement d'une compétence nécessaire pour lutter contre un peuple possédant un armement et une force physique supérieurs.
Selon les croyances de l'époque victorienne, le cannibalisme des « ogres » a été attribué au souvenir d'époques plus sauvages, lors desquelles des peuples primitifs le pratiquaient aux côtés de peuples plus évolués qui l'avait abandonné. Les selkies, décrits dans les contes comme le peuple métamorphe des phoques, ont été vus comme le souvenir de peuples primitifs voyageant en kayak et portant des peaux de phoques. Les pygmées africains ont été mis en avant comme l'exemple d'un peuple qui vivait autrefois sur de grandes étendues de territoire, mais qui deviennent rares et quasiment mythiques au fil du temps, et du développement d'autres peuples. Les historiens, comme Claudine Glot, accordent peu de crédit à cette théorie qui prouve surtout, selon eux, que « le conte est inséparable de la fée ».
Science et croyances
Bien que l'existence des fées n'ait jamais été admise scientifiquement, la croyance en ces êtres est évoquée bien des fois au cours de l'Histoire, par les croyances populaires, des alchimistes, des médiums ou des théosophes affirmant en voir et communiquer avec eux, de grandes familles médiévales les ont même revendiquées pour ancêtres. L'historien et membre du cercle zététique Paul-Éric Blanrue considère que les fées n'ont pas d'existence physique et qu'il faut être spirite pour accréditer une telle idée. Pour lui, les fées « vivent dans nos rêves, c'est la raison de leur immortalité ». La croyance aux fées a perduré grâce au folklore populaire, entre autres par la voie orale des contes, qui se transmettent parmi le peuple depuis la nuit des temps. Dès 1843, l'érudit Alfred Maury a noté que « Les fées occupent incontestablement l'un des premiers rangs dans les traditions populaires de notre contrée ».
Les religions ont différents points de vue quant aux fées. Si les monothéismes ont tous beaucoup œuvré pour diaboliser le petit peuple, les religions animistes, spiritualistes et néopaganistes acceptent beaucoup mieux les croyances féeriques.
(source : wikipedia)
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