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Conscience animale

Le Blob, un organisme bien mystérieux

Il mange mais ne possède pas de bouche...

il ne meure jamais...

il sait résoudre des problèmes...

Le blob peut apprendre et transmettre son savoir...

A la rencontre du blob, cet organisme ni animal, ni végétal, ni champignon

Le blob est un incroyable organisme primitif qui se déplace, double de taille chaque jour et peut apprendre. Audrey Dussutour, spécialiste du comportement des fourmis au CNRS, l'a rencontré par hasard. 

LE BLOB

Une fleur de tan, au Danemark, l’une des mille espèces de cet être primitif qui vit partout sur la planète. (Steen Drozd Lund / Biosphoto)

Le blob, qu'est-ce que c'est?

Cet organisme primitif doit son surnom au film américain The Blob (1958) dans lequel une gelée extraterrestre colonise la planète en avalant les habitants. Les Anglais l’appellent "vomi de chien".Un blob de 1 km² – soit la ville de Monaco – a été observé aux États-Unis, dans les Appalaches, en Virginie-Occidentale.

Selon les espèces, le blob a un système de reproduction sexuée, asexuée, ou par clonage. Un assemblage de 5 gènes détermine son sexe. Soit 720 combinaisons et autant de types sexuels.Dans ses veines, le sens de circulation du sang change toutes les deux minutes. En contractant ce réseau, il déplace sa membrane en faisant un pas en avant, un demi-pas en arrière.

La vie du blob? "Ramper derrière la nourriture"

Le blob n’est ni un animal, ni un végétal, ni un champignon. Qu’est-ce?
C’est un organisme vivant d’une seule cellule, un primitif qui a peu évolué depuis son apparition, il y a un milliard d’années. Physarum polycephalum – son nom scientifique – a des pigments comme les plantes, mange comme un animal et se reproduit comme un champignon. Grâce à la génétique, on a enfin pu le classer dans une famille, celle des amibozoaires où l’on trouve le parasite du paludisme.

Comment le reconnaître?
Il est souvent jaune orangé, gélatineux, couvert d’une membrane gluante, mais il est parfois blanc, gris, rose… Il existe mille espèces différentes, de toutes formes. En général, il est plat. Sauf quand il a très faim : il peut alors pousser en hauteur ou former des excroissances, des "pseudopieds" qui s’étendent en forme d’étoile. La vie du blob, c’est ça : ramper derrière la nourriture.
Peut-on le croiser en France?
Oui, il faut fouiller dans les forêts humides sur les écorces ou dans la litière. Ou dans le compost. On en trouve sur toute la planète, sous la neige, les tropiques… Celui de mon labo, venu d’Australie, aime vivre à 25°C. Il n’a pas apprécié que je l’emporte dans une boîte en rando à la montagne ce week-end. Je n’avais pas le choix : les blobs doivent manger tous les jours pour bien se porter!

Un blob nourri double de taille chaque jour.

Comment arrivent-ils à manger sans bouche?
Ils enveloppent leur nourriture (bactéries et champignons) puis la digèrent grâce à des substances chimiques. Un blob nourri double de taille chaque jour. En labo, on lui donne des flocons d’avoine et il peut mesurer jusqu’à 10 m². Une cellule unique grande comme un homme qui en a 100.000 milliards! Deux blobs génétiquement identiques fusionnent si vous les rapprochez l’un de l’autre. À l’inverse, on peut créer des clones en coupant un blob en morceaux d’un millimètre. Ils saignent puis cicatrisent en moins de deux minutes. Ensuite, en trois heures, ils réorganisent tout leur système veineux.

Comment se déplacent-ils?

Ils étendent leurs "pseudopieds" et contractent leur membrane avec leur réseau veineux. Un blob affamé atteint la vitesse maximale de 4 cm par heure. En labo, on le garde dans des boîtes de Petri percées [boîte transparente cylindrique, à diamètre variable et peu profonde, munie d’un couvercle]. Comme il prend toutes les formes et passe par les trous, au retour d’un week-end, j’ai retrouvé mes boîtes vides. Les blobs avaient tous fusionné et exploré les murs pour finir au plafond ! Avec ce livre, je veux faire connaître cet être extraordinaire*, que certains prennent encore pour un canular. Dans l’évolution, c’est un chaînon manquant entre les organismes unicellulaires et nous. Une fois fécondés, ses noyaux se divisent sans former de cellules distinctes. Ils restent tous dans une seule cellule qui possède au final des milliers de noyaux.

Depuis dix ans, la chercheuse du CNRS Audrey Dussutour mutliplie les expériences sur le blob. Ici, cet organisme unicellulaire étend ses « pseudopieds » et choisit à distance parmi plusieurs régimes alimentaires celui qui est idéal pour sa croissance. 

Depuis dix ans, la chercheuse du CNRS Audrey Dussutour multiplie les expériences sur le blob. Ici, cet organisme unicellulaire étend ses "pseudopieds" et choisit à distance parmi plusieurs régimes alimentaires celui qui est idéal pour sa croissance. (Cyril FRESILLON/CRCA/CNRS Photothèque)

Pourquoi n’a-t-il pas envahi la planète?
Il n’est pas invasif. À maturité, il disparaît en se transformant en millions de spores qu’il envoie dans l’environnement pour se reproduire, mais très peu se développeront. Le blob a deux handicaps : il n’aime pas la lumière et a besoin d’humidité en permanence. Placé sur un papier, il se dessèche en trois jours et ressemble à un lichen. C’est ainsi que, hors expérience, on le conserve en labo.

Il ne meurt pas?

En labo, jamais. Pour le raviver, il suffit de quelques gouttes d’eau. En une heure, il redevient jaune vif. Je travaille sur le même blob depuis dix ans, celui d’une société américaine qui le vend depuis cinquante ans. Le plus fou, c’est que, lorsqu’il sèche, il supprime toute la toxicité accumulée. On le ravive et il est comme neuf. Ce processus de "reset" intéresse beaucoup les chercheurs en cosmétique. Vous avez montré que le blob est capable d’automédication. On a d’abord déterminé son régime alimentaire idéal. Puis on a essayé de voir si le blob réussit à le composer lui-même à partir de différents menus. Pour schématiser : manger moitié de pommes et moitié de burgers. Il y est très bien arrivé! Puis on l’a placé face à 11 régimes différents, sans que préalablement il puisse les goûter. Il a choisi le plus proche de son régime optimal. Il "sent" à distance grâce à des récepteurs chimiques. Et il communique avec ses congénères. S’il est affamé, il secrète une substance répulsive. Quand il se nourrit, il secrète du calcium en déféquant. Ce signal attire les autres blobs qui viennent fusionner.

Le réseau que le blob a créé était plus efficace que celui de l’homme.

    

Ils sont aussi capables de résoudre des problèmes…
Le chercheur japonais Toshiyuki Nakagaki a placé deux sources de nourriture aux extrémités d’un labyrinthe et mis des blobs à l’intérieur. Ils ont vite trouvé le chemin et fusionné en formant le réseau le plus court possible. Quand un blob trouve de la nourriture, il crée une veine pour s’y relier et en supprime d’autres, c’est magique. Plus incroyable : ce chercheur a reproduit le réseau ferroviaire entourant Tokyo sur de petites cartes, où chaque pétale d’avoine représentait une ville. Le réseau que le blob a créé était plus efficace que celui de l’homme. Un chercheur anglais a en a tiré un algorithme.
Peut-on imaginer des applications thérapeutiques?
Je l’espère. Le réseau veineux du blob se forme selon les mêmes lois physiques que la vascularisation des tumeurs cancéreuses, il pourrait donc servir de modèle. Il a aussi des propriétés anticancéreuses pour certaines lignées de cellules. C’est surtout un grand recycleur, capable d’accumuler des métaux lourds, comme le zinc, dans des proportions 1.000 fois supérieures à tout autre être vivant.

Le blob peut apprendre et transmettre son savoir

Votre plus célèbre expérience prouve que le blob, dénué de cerveau, peut apprendre…
C’est le premier stade de l’apprentissage : le processus d’habituation. Nous l’utilisons au quotidien lorsqu’on, par exemple, on rentre dans une pièce où l’odeur est désagréable : on finit par s’y habituer et à l’oublier. Pour le blob, l’expérience a consisté à lui faire ignorer une substance amère qu’il n’aime pas, la quinine. On en a couvert un pont de 1,5 cm qu’il devait traverser pour accéder à des pétales d’avoine. D’abord très réticent, il a mis douze heures avant d’y poser un pseudopode. Mais à peine a-t-il accédé à la nourriture que, en un éclair, il a transféré tout son organisme. Après six jours, il n’a plus montré la moindre aversion. Ce comportement, qui repose en temps normal sur un système nerveux ou un réseau de cellules, est très surprenant chez un unicellulaire.

Ils savent même transmettre leur savoir!
Oui. Nous avons entraîné 2.000 blobs à s’habituer au sel, qu’ils n’aiment pas. De l’autre côté, nous avions 2.000 blobs "naïfs". Nous avons testé toutes les associations possibles - un expérimenté avec un naïf, deux naïfs, deux expérimentés… Conclusion, il suffit d’un blob expérimenté dans le groupe pour diffuser l’info aux trois autres. En filmant de très près la fusion, on a découvert qu’une veine se forme à l’endroit de la jonction, en trois heures. L’information transite par là, mais sous quelle forme? Ces jours-ci, nous testons l’apprentissage associatif. Comme Pavlov a conditionné son chien, on donne de la nourriture salée au blob pour qu’il associe le sel à la récompense. Au bout de dix jours, sur 90 blobs testés, 30 ont choisi le pont salé. Un élément répulsif est devenu attractif! Mais les 60 autres n’ont rien compris. Pourquoi, alors que ce sont tous des clones? C’est l’un des mystères qu’il nous reste à percer.

(source : lejdd)

 

  

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